jeudi

Sordide

Je voudrais couper les ponts; que ça soit hygiénique, propre, net et sans bavure. Faire le tri. Pas de giclures sur les murs. Pas d'hémoglobine sur le tapis. Pas d'intestin grêle dispersés dans la cuisine. Pas de cervelle sur le carrelage. Pas de rate dans l'escalier. Pas de ligaments éclatés dans la douche. Juste une incision nette, franche dans cette bouillabaisse de saloperies qu'on appelle la mémoire.

mercredi

Inventaire

Etats d'âme

En transit

une nuit à Prague

Gestation

Période de digestion des souvenirs: les ensoleillés, les voyageurs, les rigolos, ceux que je voudrait garder, mais qui m'échappent. Les trop présents, trop proches que je voudrait oublier, des souvenirs d'un échec de trois ans. Les souvenirs à venir, ceux que je vais me fabriquer, proches ou incertains. Enfin les inutiles et pourtant obsédants, ceux dont je me rappelle sans faire exprès.

Je ne négocie pas avec les terroristes

Engoncée dans une confortable couverture de chaleur et de paresse. Manger fumer dormir regarder des feuilletons espagnols à la mords-moi-le-gnou jouer à super mario lire la rubrique insolite de courrier international. Dans l'attente latente du départ. Même situation que l'an dernier. Même acteurs, même décor: intérieur jour, il fait très chaud, l'héroïne se croit dans un bouquin de Camus avec le soleil qui lui brûle les yeux quand elle sort fumer une cigarette et l'horizon qui disparait derrière une pile d'immeubles entassé pèle-mèle dans la moiteur pègueuse nimoise. Le frigo est plein, le porte-monnaie est vide; il traine un sorte de lenteur insupportable et gluante que je n'ose pas appeler ennui. Le dépit avant l'aventure.

jeudi

Dans la dèche à Paris et à Prague

[ electrelane: to the east ]

jour 1
Les bus Eurolines sont mortels. Pas dans le sens où on a envie d'y faire la salsa du démon [ou la samba du malin, le cha-cha-cha du cornu, la tecktonik de lucifer, le rock acrobatique de satan, le boogie woogie d'hadès, la rumba de méphistophélès, le pogo du 666, la valse du diable, et j'en passe..], mais dans celui (le sens) où le voyage ressemble presque à un aller direct pour Guantanamo dans un convoi conduit par les FARC. Et j'exagère à peine. Voisins de siège énormes, envahissants, dérangés, bavards; chauffeurs tyranniques; et des films américains en tchèque avec des grosses motos et John Travolta. Pour finir, le chauffeur a tenté de nous abandonner, Antoine, Gaetan et moi à 100km de Prague, à cause d'une fausse pause cigarette..
jour 2
Une fois arrivés à Prague, après avoir fait tous les trucs que les touristes font (changer l'argent, planter les tentes, ne pas comprendre le système du tram..) on a attaqué, avec un peu de dégoût, la space-compote et la space-faisselle d'Antoine, puis on a fait notre première virée à Prague. Être excessivement perché dans une grande ville inconnue où les gens parlent une langue incompréhensible peut être traumatisant; ça l'a été. Surtout lorsque le tram praguois grince symphoniquement et qu'une armée de chevaux déguisés tourne la tête vers vous sur fond de musique abominablement psychédélique.

jour 3
Après une folle soirée de délires psychotiques, on a décidé de visiter Prague l'esprit plus clair. Quartier juif, maison dansante (signée Franck O. Gehry), bière dans un bar attrape-touriste. Au passage, le camping nous informe qu'on doit payer plus. Nous sommes (presque) ruinés.

jour 4
Anniversaire de Gaëtan. Pour ça on reste toute la journée à glander au camping. On se traite de ped, on joue à pokémon, Aurore et Antoine vont "toucher" en ville, auprès d'un certain Éric qui tient un magasin de hip hop pas loin d'un restaurant mexican food. Le soir, premiers pétards de beuh tchèque (qui vient en fait de Hollande); c'est le début de la fin de notre raison.